Les attentats de Nice (1/3)

0
48
Promenade des anglais – ville de Nice

Nice, jeudi 14 juillet 2016, 22h33… alors que plus de 30 000 personnes déambulent sur la promenade des Anglais pour les festivités de la traditionnelle fête nationale, un camion de 19 tonnes surgit au beau milieu de la foule et remonte la promenade sur pas moins de 2km. Au volant, un homme âgé de 31 ans, renverse et tue une centaine de personnes avant d’être stoppé dans sa course folle par les policiers : il est abattu à 22h37 après des échanges de coups de feu. 4 minutes et 17 secondes, c’est le temps exact qu’il aura fallu à Mohamed Lahouaiej Bouhlel, ce chauffeur-livreur qui conduisait le camion, pour faire de la promenade des anglais une scène de chaos et d’effroi.

Plusieurs défis de taille s’annoncent alors pour les enquêteurs : établir le cheminement de l’auteur, couvrir une scène de crime très étendue (1847 mètres exactement), identifier les victimes… Grâce à la collaboration de différents services de Police Judiciaire et notamment l’intervention des effectifs de Police Technique et Scientifique, 86 victimes seront identifiées en moins de cinq jours.

Mais comment la PTS intervient elle dans le cadre de constatations sur une scène d’attentat aussi appelée scène de catastrophe de masse ? Quelles sont les méthodes déployées par les services lors de catastrophe de masse et les moyens mis à leur disposition ? A travers les explications d’un Technicien PTS, qui est intervenu à Nice, nous allons vous détailler le travail effectué par la PTS sur cette scène de crime hors normes.

La gestion des scènes d’attentat : un protocole bien particulier

“Le protocole attentat est une mutualisation de nombreux services : Police, APHP (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris), pompiers… qui permet d’être opérationnel rapidement et notamment sur du multi-attentat comme on a pu le voir en 2015 lors des attentats de Madrid” , nous indique Jérôme, Technicien Principal de PTS et formateur en scène d’attentat. Lorsqu’une tuerie de masse se produit, et comme sur toute scène d’infraction au sens plus large, la priorité est de sécuriser la zone : il s’agit de neutraliser les auteurs et s’assurer qu’il n’y a plus de danger pour que les différents services puissent intervenir en toute sécurité. La BRI (Brigade de Recherche et d’Intervention) ou le RAID (Recherche, Assistance, Intervention et Dissuasion) sont par exemple susceptibles d’intervenir pour effectuer ce travail de sécurisation.

Dans un deuxième temps, les services de secours sont envoyés sur place : pompiers et SAMU arrivent et réalisent un premier « tri » des victimes : urgence absolue, urgence relative… les victimes qui sont les plus gravement blessées seront envoyées au plus vite dans des hôpitaux définis.

« Les personnes décédées seront laissées sur place », précise Jérôme. « C’est à ce moment-là que les effectifs de la PTS vont intervenir avec le service enquêteur saisi du dossier ».
Comme sur toute scène d’infraction, les effectifs de la PTS sont chargés d’accompagner et d’assister les Officiers de Police Judiciaire en charge des investigations dans les constatations. Dans une scène d’attentat, bien souvent très étendue, il est nécessaire d’effectuer un quadrillage et de créer des zones. C’est ce qui a été fait pour les attentats de Nice : 16 zones ont été créées pour ne passer à côté d’aucun élément et être en mesure d’analyser chaque partie avec la plus grande des minuties. Ces zones ont permis de couvrir les recherches sur l’entièreté de la scène, longue de presque 2000m.

L’entrée en scène de la PTS

Les effectifs de la PTS ont ensuite plusieurs missions à réaliser et sont répartis en plusieurs unités.

Les constatations sur les lieux

Sur place, les agents et techniciens de PTS sont chargés de rechercher les traces et indices dans leur zone. Vêtus d’Équipements de Protection Individuelle (aussi appelés EPI) pour ne pas contaminer la scène – et ne pas se faire contaminer par d’éventuelles traces biologiques – ils partent à la recherche de tous les indices possibles : des objets (armes…), des traces ADN, des éléments balistiques
Ils réalisent ensuite des photos, du général au particulier : l’idée est d’avoir des vues générales de la scène, des vues plus rapprochées pour situer les indices et des vues de détail.
Des plans sont également réalisés avec des prises de côtes : il s’agit de savoir avec précision où étaient situés les différents éléments lorsqu’ils ont été retrouvés sur la scène
Enfin, les objets et les différentes traces sont prélevés, conditionnés et placés sous scellé.

Le placement sous scellé
En principe, le placement sous scellé est réalisé par l’Officier de Police Judiciaire présent sur les constatations avec les effectifs de Police Technique et Scientifique. Mais depuis 2019, les effectifs de la PTS sont autorisés à placer des éléments sous scellés seuls, mais sur instruction d’un officier de police judiciaire (article D-15-5-1-1 du CPP).

Concernant la prise en charge des victimes décédées, les effectifs de PTS travaillent en collaboration avec les services enquêteurs. Des bracelets spéciaux, appelés « bracelets SINUS », sont placés sur chaque corps : ils permettent dans un premier temps d’enregistrer chaque victime pour ensuite établir un dénombrement précis. Ces bracelets sont en réalité dotés d’un QR Code qui correspond à un numéro personnel et unique pour chaque victime.

Le matériel à disposition de la PTS

La majorité des services d’intervention de la PTS qui sont susceptibles d’intervenir sur les scènes d’attentat sont dotés de « mallettes attentat », préparées en amont et prêtes à être utilisées rapidement en cas de déploiement des équipes sur une scène.
Elles contiennent entre autre :
– du matériel pour baliser les lieux : rubalise…
– des cavaliers, légèrement différents de ceux utilisés sur les scènes de crimes classiques, qui permettent de matérialiser les différents éléments présents.
– du matériel pour réaliser les prélèvements : écouvillons stériles, pinces, scalpels, compresses stériles…
– du matériel pour le conditionnement : enveloppes, bocaux, sacs poubelle…

Le contenu de ces mallettes constitue du matériel de première nécessité pour réaliser les premiers balisages et les premières constatations : en effet, rapidement après l’arrivée des premiers effectifs PTS présents en local, des effectifs venus d’autres services en France viennent prêter main forte. Ils se rendent sur les lieux avec des camions équipés de matériel plus diversifié et en grande quantité.

Lire la suite

5/5 - (1 vote)