La morphoanalyse des traces de sang

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Vous est-il déjà arrivé de regarder une série ou un film policier où les acteurs interviennent sur une scène de crime ? Au milieu des techniciens de police scientifique habillés en blanc, armés de leurs pinceaux et écouvillons, vous remarquez quelque chose d’étrange : une série de ficelles rouges qui courent du sol, du mur, de la table et du canapé pour se rencontrer au même point.

Ces ficelles sont simplement un outil pour aider les experts à tirer des conclusions à partir d’une substance qui se trouve souvent sur les scènes de crime : le sang.

Le sang est un élément primordial sur une scène, il permet d’établir un profil génétique mais pas seulement : où le sang atterrit, comment il atterrit, sa consistance, la taille et la forme de ses gouttelettes ou éclaboussures, peuvent révéler de nombreux aspects importants du crime. L’étude de ces données s’appelle la morphoanalyse des traces de sang.

Mais qu’est-ce que la morphonanalyse ? En quoi cela consiste ?

Dexter Morgan le serial killer de la série américaine du même nom. En plus de son rôle d’antihéro sociopathe, Dexter travaille pour la police de Miami comme analyste en morphoanalyse de trace de sang.

 

La morphoanalyse des traces de sang

Cette discipline est fondée sur l’observation et l’analyse des caractéristiques des traces de sang (taille, forme, dispersion) et leur relation avec la scène. Elle permet ainsi de déterminer les événements sanglants à l’origine de ces traces, et parfois d’établir un scénario permettant de comprendre le déroulement des faits.

 

Les propriétés du sang

Pour comprendre comment les analystes interprètent les taches de sang, il faut d’abord comprendre les propriétés de base du sang.

Le sang contient à la fois du liquide (plasma et sérum) et des solides (globules rouges, globules blancs, plaquettes et protéines). À l’intérieur du corps, le sang navigue à l’état liquide : lorsqu’une personne se blesse, se coupe, le sang sort du corps à l’état liquide ; cependant il ne reste pas longtemps sous cette forme. Généralement, le sang commence à coaguler en quelques minutes, formant une substance rougeâtre sombre et brillante qui se solidifie au cours du temps.

Le sang peut quitter le corps de différentes manières, selon le type de blessure infligée. Il peut s’écouler, être pulvérisé, gicler, jaillir ou simplement suinter des blessures.

 

Les différents types de traces

Nous pouvons classer les traces de sang en trois types principaux : les traces passives, les traces transférées et les traces projetées ou d’impact.

Les traces passives comprennent les gouttes, les écoulements et les flaques, et résultent généralement de l’action de la gravité sur le fluide sanguin.

Des traces de sang passives

Les traces transférées résultent d’objets entrant en contact avec des traces de sang existantes, comme une trace de main sanglante ou la trace d’un corps traîné.

Une trace de sang transférée

Les traces d’impact résultent de la projection de sang dans l’air et sont généralement considérées comme des éclaboussures.

Une trace de sang projetée

Après une analyse approfondie par l’expert, les traces de sang peuvent fournir des indices importants sur les faits, tels que :

  • Le type d’arme utilisée
  • La vitesse de projection du sang
  • Le nombre de coups
  • La position et mouvements de la victime et de l’agresseur pendant et après l’attaque
  • Quelles blessures ont été infligées en premier
  • Le type de blessures
  • Depuis combien de temps le crime a eu lieu
  • Si la mort a été immédiate ou retardée

 

Comment déterminer le point d’origine de l’impact ?

Lors de son analyse, l’expert s’appuie sur trois principaux éléments interdépendants : la taille, la forme et la répartition des traces de sang. La partie la plus frappante du processus, et donc celle qui figure le plus dans des séries comme “Dexter”, est la technique du cordage. Cette technique ne peut avoir lieu seulement après que les experts aient analysé certains aspects des traces de sang.

1)    Le sens de projection

Les experts peuvent déterminer le sens de projection d’une éclaboussure en étudiant sa forme : le point d’impact de la goutte aura une forme arrondie tandis que la partie la plus éloignée sera déformée et irrégulière. La trace de sang aura donc une forme d’ellipse plus allongée dans la direction opposée à la source.

Une trace en forme d’ellipse

2)    Détermination de la zone de convergence

Si un certain nombre de traces de sang rayonnent vers l’extérieur, les analystes vont pouvoir tracer des lignes le long de ces éclaboussures jusqu’à une zone de convergence (point où plusieurs lignes se rencontrent).

Détermination du point de convergence

Mais cela ne donne qu’un espace en deux dimensions. Pour déterminer le point d’origine de l’impact, les analystes doivent également calculer à quelle distance au-dessus du sol se trouve la zone d’origine.

3)    Détermination de la zone d’origine

La zone d’origine correspond à la zone où l’impact a eu lieu dans l’espace. Pour déterminer cela, l’expert doit calculer l’angle d’impact.

Les gouttes de sang qui tombent à l’aplomb d’une surface font des taches rondes, le diamètre de la trace augmentant avec la hauteur de chute.

Par contre lorsque qu’une goutte de sang tombe sur une surface avec un certain angle, nous avons vu précédemment que la trace formée par cette goutte aura tendance à faire une marque allongée, en forme d’ellipse.

L’expert mesure chaque trace de sang et détermine l’angle d’impact grâce à une formule mathématique.

Un expert calcule l’angle d’impact d’après la largeur et la longueur d’une trace de sang

Une fois que les experts connaissent ces angles, ils peuvent commencer à placer des ficelles depuis les bords arrières des taches de sang, aux angles appropriés, afin de trouver la fameuse zone d’origine de l’impact et ainsi mieux comprendre le déroulement des faits.

Les experts mettent en place les ficelles avec l’angle d’impact approprié.

 

Comme vous pouvez le constater, la morphonanalyse des traces de sang n’est pas aussi simple que Dexter Morgan le fait apparaître. Les experts dans le domaine disent d’ailleurs qu’il s’agit autant d’un art que d’une science. Bien que les aspects importants de la matière soient étayés par la recherche, les experts doivent veiller à ne pas dépasser les limites. Si l’acte violent implique plusieurs victimes et plusieurs agresseurs, le défi devient encore plus complexe, mais un analyste bien formé et expérimenté peut fournir des informations clés afin de comprendre l’action.

De plus en plus, les experts profitent de programmes informatiques qui leur permettent de stocker des données de projections, de calculer des valeurs telles que l’angle d’impact et d’afficher des informations dans des rendus 3D.

L’université d’Aix-Marseille en partenariat avec le CNRS a même développé une application pour smartphone et tablette permettant de dater une trace de sang à partir d’une photographie.

Les fabricants de logiciels espèrent pouvoir à terme numériser des scènes de crime avec des lasers ou automatiser l’analyse d’images numériques, mais de nombreux obstacles subsistent encore.

 

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