L’incendie du bazar de la charité

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Le 04 mai 1897 un incendie aussi violent que rapide va dévaster le bâtiment en bois abritant la 13ème édition du “Bazar de la charité” – évènement de vente et de dons dont les bénéfices vont au plus démunis. Plus d’une centaine de victimes piégées à l’intérieur de la structure vont périr faute d’échappatoire.

Cette catastrophe historique va marquer profondément la société, car parmi les victimes, figurent de nombreuses femmes de la haute société et de la noblesse dont la Duchesse d’Alençon, Sophie-Charlotte de Bavière, sœur de Sissi impératrice.

Une série télévisée s’est inspirée récemment de cet événement dramatique qui marqua le tout Paris par la violence des faits et l’identité des victimes.

Prémices de l’identification des victimes de catastrophe et de l’identification odontologique

Sur initiative du consul du Paraguay, les corps les plus abîmés par le feu, seront identifiés par leur schéma dentaire. Cela va permettre de reconnaître formellement plus de 30 personnes.

Ce sera le coup d’envoi en France, d’une technique primordiale et devenue indispensable dans les protocoles scientifiques actuels : l’odontologie medico-judiciaire

Retrouvez notre dossier spécial en 3 parties : avant le drame, le drame, après le drame. 


L’évènement du bazar de la charité 

Le 04 mai 1897, au 23 rue Goujon dans le 08ème arrondissement de Paris, le temps est agréable et propice à la flânerie. La foule continue à se presser dans un grand bâtiment en bois, érigé pour abriter le bazar de la charité. C’est la troisième journée de vente et de dons pour cette institution incontournable dans le paysage parisien de l’époque, l’ancêtre de la sécurité sociale.

Un événement bien rodé qui se déroule depuis treize ans déjà. Une œuvre de bienfaisance qui réunit des centaines d’œuvres de charité au profit des plus nécessiteux, le tout sous la présidence du baron Mackau et de M. Henri Blount le fondateur.

Pour abriter cette édition, le choix des organisateurs se porte cette année, de 1893, sur une construction temporaire tout en bois dont l’aménagement intérieur est la reconstitution d’une rue du Moyen-âge (décor emprunté à un théâtre), pour surprendre les visiteurs et ravir les participants. Les stands sont installés dans les échoppes disposées en comptoirs tenus par des dames patronnesses toutes dévouées à vendre des dons reçus, procurant ainsi des fonds importants pour plusieurs établissements charitables.  

En entrant, on ne peut que s’extasier sur cette illusion à grand renfort de fioritures, de décorations en tout genre, des guirlandes ici, des décors peints là. Il y a même des enseignes aux noms surprenants accrochées devant les échoppes. En levant les yeux au plafond, on découvre qu’un vélum de toile goudronnée a été tendu afin de le recouvrir, histoire d’harmoniser l’ensemble.

Il faut traverser le bâtiment principal pour rejoindre l’endroit où a été installée la toute nouvelle attraction qui n’a alors que deux ans d’existence : le cinématographe. 

Dans cette petite salle de projection (9 mètres de long pour 4 mètres de large) accolée au bazar, il est diffusé les toutes premières bandes animées. Que d’émotions à vivre pour seulement 50 centimes. 

Projecteur avec lampe oxyéthérique (vue intégrée)

Grâce au système de la lampe Molteni, ces projections sont possibles en l’absence d’électricité, comme l’indique le technicien Bellac à l’époque : « Ma besogne consistait à faire jouer le mécanisme de l’appareil et à régler en même temps la lumière des projections. Cette lumière est faite dans une lampe oxyéthérique : un bâton de chaux est porté par une tige à l’avant de la lampe ; sur lui, on dirige la flamme de l’éther en ayant soin d’insuffler, à travers ladite flamme, de l’oxygène avec une haute pression. Le bâton de chaux étant chauffé à blanc, cela produit une lumière blanche presque aussi intense, presque aussi jolie que l’électricité »

Les séances s’enchaînent avec beaucoup d’enthousiasme pour cette nouvelle technique. Des bandeaux en celluloïds passés rapidement donnent l’illusion d’être animées, provoquant émerveillement, stupeur et parfois même de grandes peurs dans le public. Le film « la mi-carême » se termine quand il fallut remplir à nouveau la lampe pour continuer ses projections. Mais le manque de visibilité, l’incompréhension entre les deux techniciens va tourner au drame.

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