La disparition de Maëlys de Araujo (2/3)

0
24

Dans la nuit du 26 au 27 août 2017, à 3h15 du matin, à l’occasion d’une soirée de mariage, une fillette âgée de 8 ans prénommée Maëlys disparaît à son tour. Très rapidement, la thèse de l’enlèvement est privilégiée, et les invités présents le jour du mariage sont auditionnés.
Plusieurs témoins affirment avoir vu la fillette discuter avec un homme d’une trentaine d’années : celui-ci lui aurait montré sur son téléphone les photos de ses chiens, deux malinois, et l’aurait fait monter dans sa voiture.

Grâce aux photos prises le jour du mariage, on identifie rapidement cet homme : il s’agit de Nordahl Lelandais, une connaissance lointaine du marié, qui se serait tout bonnement invité au mariage. Au même titre que les autres invités, il va alors être auditionné : les enquêteurs savent déjà que cet ancien maître-chien de l’armée est connu de la justice, notamment pour des faits de vol.

L’audition de Nordahl Lelandais et les premières constatations

Lors de son audition, Nordahl Lelandais indiquera aux enquêteurs ne jamais avoir adressé la parole à la fillette, contrairement aux déclarations des témoins présents sur place le soir du mariage. Cela va bien évidemment intriguer les policiers et leur donner de quoi creuser davantage la piste.

Une fois de plus, c’est l’exploitation des caméras de vidéo-surveillance qui va, dans un premier temps, permettre de confondre Lelandais.

Tout d’abord, le système de vidéo-surveillance de la ville l’a filmé, la nuit de la disparition de la fillette, à deux reprises entre 2h45 et 3h15 du matin : sur les premières images, on l’aperçoit rouler dans son véhicule – une Audi A3 grise – et un passager est visible à l’avant. Sur les images suivantes, 30 minutes plus tard, on voit de nouveau le véhicule, circuler dans l’autre sens, mais cette fois sans passager à l’avant…

Dans un second temps, son véhicule sera filmé dans une station-service le lendemain de la disparition ; on y voit le suspect en train de nettoyer son véhicule de fond en comble. Le coffre sera récuré, la portière avant côté passager sera minutieusement astiquée… pendant près d’1h45, il nettoiera sa voiture et emportera avec lui dans un sac poubelle toutes les lingettes utilisées pour le nettoyage.

Nettoyer pour effacer ses traces...
L’utilisation de certains produits chimiques sur des traces ADN ou papillaires peuvent conduire à leur dégradation ou à leur destruction et rendre leur exploitation impossible. Mais une trace devenue invisible à l’œil nu ne veut pas dire disparue ! L’utilisation du Spermtracker ou du Bluestar par les effectifs PTS sur les scènes de crime peuvent permettre de révéler des traces de sperme ou de sang qui ont été nettoyées et effacées.

C’est également une nouvelle analyse de son téléphone portable, via le bornage téléphonique, qui permettra aux enquêteurs de savoir qu’il a quitté le mariage au moment où la disparition de la jeune Maëlys a été constatée.

L’analyse de son véhicule

Pour étayer ces découvertes, et malgré le nettoyage minutieux effectué par Lelandais, son véhicule va alors être saisi et une recherche de traces va être réalisée par la Police Scientifique.

Une fois les prélèvements effectués, ils ont été envoyés pour analyse en Laboratoire. Et les résultats ne se sont pas fait attendre : l’ADN de contact de la fillette a été retrouvé sur une commande de phare de la voiture de Nordahl Lelandais, preuve qu’elle était bien montée dans la voiture.

Des chiens chercheurs de cadavres ont également été dépêchés pour l’exploitation des traces dans le véhicule : l’utilisation excessive de produits de nettoyage dans la voiture n’a pas permis d’identifier l’odeur de Maëlys, et a même rendu les chiens malades après leur travail de recherche…

 

De nouvelles auditions pour faire craquer Lelandais…

Les enquêteurs l’interrogent à nouveau, mais Nordahl Lelandais a réponse à tout. Au nettoyage très approfondi de son véhicule, il répond qu’il l’a effectué en vue de la vente de celui-ci.
Les comportementalistes de la Gendarmerie viennent alors prêter main forte à la Section de Recherche de Grenoble et vont scruter son comportement pendant les auditions. Stéphanie Le Maoût, chef d’escadron au Département des Sciences et du Comportement, indique : “Très rapidement, je suis marquée par sa froideur, froideur que je n’ai vue que deux fois en 20 ans à ce niveau-là. Il ne vacille jamais : il a des griffures au niveau des bras, et avec un aplomb déconcertant, il nous dit qu’il s’est griffé en jardinant. Alors que l’on sait très bien qu’il n’a pas d’activité de jardinage… Il restait impassible : c’était déconcertant”.

Il finit par répondre de manière très maladroite lorsque les enquêteurs lui indiquent que l’ADN de la fillette a été retrouvé dans le véhicule, en indiquant qu’elle est montée à l’arrière de la voiture avec un autre petit garçon présent à la soirée. Or, l’ADN a été retrouvé sur la commande du phare, située donc à l’avant… En reconnaissant que la fillette est entrée dans la voiture, il justifie la présence de son ADN ; mais cela ne prouve en rien que c’est lui qui l’a fait disparaître…

 

Le 3 septembre 2017, le suspect est mis en examen pour enlèvement et séquestration par les deux juges d’instruction chargés de l’affaire. Malgré ses explications qui ne tiennent pas la route, il n’est toujours pas passé aux aveux ; les enquêteurs vont alors s’intéresser à sa personnalité, son parcours, et son mode de vie.

La double facette de Nordahl Lelandais

L’homme de 34 ans montre en réalité deux visages : celui du bon copain, décrit comme serviable, disponible et jovial par ses amis. Ce même “Nono” est dépeint comme colérique, agressif et parfois violent par plusieurs de ses ex-compagnes, surtout lorsqu’il est contrarié ou contesté.

Les enquêteurs vont se rendre compte qu’il possède deux téléphones portables : un premier pour les contacts avec sa famille et ses amis, et un second pour draguer sur les applications de rencontre. Jordan, comme il se fait appeler sur ses sites, multiplie les conquêtes féminines… mais aussi masculines, comme le montre une relation qu’il a entretenue avec un homme entre octobre 2016 et août 2017. Cette vie de rencontres secrètes, il n’en parlait visiblement à personne.

Nordahl Lelandais était également un consommateur de drogues. Certaines de ses conquêtes masculines indiquent qu’avant et pendant leurs relations sexuelles, le suspect consommait de la cocaïne en grande quantité.

D’un côté, une vie en apparence rangée, une carrière de militaire à son actif ; d’un autre côté, des mœurs sexuelles débridées, une grande consommation de drogues… Une question se pose alors : si Lelandais est réellement l’auteur de ces deux disparitions, le mobile sexuel est-il envisageable ?

Lire la suite

5/5 - (1 vote)